
Je suis tout autant passionné par les livres que par ceux et celles qui les écrivent. Il suffit parfois de s’intéresser à ces personnes dont les noms ou les pseudonymes figurent sur les couvertures d’ouvrages pour découvrir des vies aussi romanesques que les histoires racontées par ces écrivain.e.s. Je profite de l’occasion de Journée mondiale du livre et du droit d’auteur pour m’arrêter un moment sur des faits souvent méconnus de 3 de nos brillants auteurs : Mongo Beti, Réné Philombe et Ferdinand Oyono.
PRISON
Réné Philombe, l’auteur entre autres, d’‘Un sorcier blanc à Zangali’ et de ‘Lettres de ma cambuse’, connut la prison à plusieurs reprises à cause de ses écrits, mais il est surprenant de savoir qu’il rencontra le président Ahidjo dont il combattait farouchement les idées :
” En 1965, il avait envoyé, à ma grande surprise, une grande Mercedes. Je suis allé à son invitation. Au cours de la conversation, il m’a demandé s’il était possible que je sois la caisse de résonnance de sa politique. Il avait donné l’exemple du journal égyptien Al Arab. J’ai eu un sursaut et lui ai dit que j’allais y réfléchir. Il m’a accordé le temps nécessaire à cet effet. C’était un homme d’une grande simplicité. Alors que je l’attaquais à plate-couture et ouvertement, il m’avait dit qu’il était au courant du fait que j’étais régulièrement emprisonné et des conditions difficiles qui étaient les miennes. Je fus surpris ! «C’est vous qui avez ordonné qu’on m’arrête ?» «Non, avait-il répondu. Je ne savais même pas que vous aviez été arrêté. C’est en lisant en rapport vous concernant que j’ai su». J’avais en effet été enfermé dix fois !”
Interview complète sur Mosaiques : https://mosaiques.africa/rene-philombe-nous-avons-tres…/

PIRATERIE
Qui n’a pas lu Ville cruelle d’Eza Boto, serait-on tenté de demander tant l’ouvrage a marqué des générations de lecteurs. Mais il est fascinant de savoir que le succès de ses ouvrages causait aussi de nombreux déboires à l’auteur :
« C’est en 1979 que, pour la première fois, j’appris qu’une de mes œuvres, traduite en espagnol et imprimée à Cuba, était commercialisée à Madrid, en Espagne. C’est un ami colombien, employé dans une librairie du Marais à Paris, qui m’en informa. Il me conseilla aussi d’écrire à la Maison de Cuba, à Madrid, pour en savoir plus, et même, pourquoi pas ? pour me faire payer les droits sur l’œuvre traduite – selon lui Perpétue et l’habitude du malheur.
J’écrivis donc quelques jours après cette conversation à la Maison de Cuba à Madrid, et attendis en vain une réponse. »
L’article de Mongo Beti dans ‘Peuple Noirs Peuples africains’ la revue qu’il créa et anima avec son épouse Odile Tobner :
http://mongobeti.arts.uwa.edu.au/…/pnpa46_01.html…

AGRESSION
L’épisode de l’agression de Ferdinand Oyono est à peine croyable tant l’auteur du ‘Vieux nègre et la médaille’ connut une carrière riche de diplomate et de membre du gouvernement au Cameroun. Mais l’on peut découvrir que l’auteur affronta quelques aventures houleuses lorsqu’il était encore en France :
Le 1er mai 1959 à minuit passé, à hauteur du carrefour de l’Odéon, la police municipale parisienne découvre un homme étendu sur le trottoir. Âgé de 29 ans, l’homme, de nationalité camerounaise se nomme Ferdinand Oyono et l’auteur de deux romans anticoloniaux à succès.
L’union des écrivains pour la vérité protesta vigoureusement contre « l’agression raciste » dont fut victime l’écrivain camerounais :
https://www.lemonde.fr/…/l-union-des-ecrivains-pour-la…

On le voit les livres et leurs auteurs vivent des péripéties parfois rocambolesques. Normal donc d’exalter en ce jour le livre et le droit d’auteur !